Vous ne rêvez pas… C’est bien un second article en moins de dix jours.
Mais la raison qui justifie ces deux articles rapprochés est que je tenais à poster celui-ci le 14 février, pour pouvoir vous parler d’amûûûr !
Enfin amour est un bien grand mot puisque ce n’est jamais allé jusque là, mais au moins de rencontres. Et histoire de consoler tous les célibataires tristounes en cette journée bien commerciale, de rencontres qui ont fait un gros flop.
Encore une fois je me dévoue pour mon public, et vous propose de rire de mes malheurs.
Alors non, je ne repars pas sur un nouveau chapitre du manuel du petit ami Japonais ni sur une autre explication de comment se fête la Saint Valentin à l’autre bout du monde, mais on va quand même parler de déboires amoureux, parce qu’on aime bien quand tout tourne en eau de boudin. (Avouez que si y’a bien UN sujet où on s’identifie tous à un moment donné, c’est bien celui des histoires foirées…)
Comme je n’ai aucune pudeur et que je vous ai déjà déballé toute ma vie amoureuse dans Mes Histoire d’A., vous savez déjà que Cupidon m’a carrément boudée – voire brimée – pendant plusieurs années, et que les fées de la romance ne s’étaient pas spécialement penchées sur mon berceau.
Bon, on dirait que ça s’est un peu arrangé maintenant, mais on est clairement pas là pour parler de choses heureuses – boriiiing – donc revenons plutôt sur d’autres échecs afin de faire travailler un peu vos zygomatiques.
Aujourd’hui, je vous propose de revenir sur le top de mes meilleurs flops en plein date ! Car avant de subir vivre mes histoires d’amour nazes, il y a aussi eu des rencontres et des rencards tout aussi nazes.
Après je ne vais pas vous parler de dates ratés lambda, où on a rien à se dire ou encore où la personne ne ressemble pas à ses photos ou autres… Ça, c’est du réchauffé qu’on voit partout. Non, je vous ai choisi juste les plus cocasses. Ceux dignes de moi, quoi.
Si vous avez lu Mes histoires d’A., vous savez que j’ai eu une longue traversée du désert de trois ans, entre mon départ de Corée en 2013 et l’automne 2016.
Si la première année ce célibat était choisi, les deux années suivantes ont été un peu longues, un peu désespérées, et un peu en quête de trouver quelqu’un avec qui adoucir ce morne quotidien.
Sauf qu’entre temps, j’avais commencé ma vie d’indépendante en télétravail, c’est à dire à bosser seule à la maison… Alors si vous aviez lu ce blog il y a un an, vous auriez peut-être pas vraiment vu le souci, mais maintenant que la moitié de la planète est en télétravail à la maison, je pense que tous les célibataires visualisent bien la problématique sous-jacente. Oui, niveau nouvelles rencontres, c’était plutôt limité.
C’est donc isolée et en mal de nouvelles rencontres, surtout après mon arrivée en Australie, qu’en 2014, je suis les conseils d’autres amies célibataires qui me vantent les mérites d’une appli de rencontres « super » qui commence à devenir célèbre : Tinder.
Et c’est ainsi qu’entre 2014 et 2016, j’entame ma longue traversée du désert sur l’enfer de cette application… pour décrocher quelques belles anecdotes saugrenues.
Voici donc rien que pour vous mesdames et messieurs, le récit de mes trois plus beau rendez-vous qui ont fini en naufrage !
Ambiance topito, c’est parti !
Top 3 : Quand Pierre Richard drague à la plage
Nous sommes fin 2014, et je suis à Sydney depuis déjà quelques temps. Cela fait plus d’un an que j’ai quitté la Corée du Sud et que je digère ma dernière relation (autant vous dire que ça ne se passe pas sans reflux acides), et je commence à avoir naïvement envie de redonner une chance à la gente masculine.
Toutefois, il convient de préciser que si je n’ai jamais été une grande séductrice de base, ma dernière relation de l’époque m’avait bien amoché l’estime de moi-même, déjà pas bien haute d’ordinaire… Aussi, je me remettais sur le marché de la drague avec à peu près cette assurance :
Assez vite, je tombe sur Alphonse (toutes mes rencontres seront renommées avec grand soin).
Il a le même âge que moi, il est plutôt gentil et surtout ce que j’aime bien chez lui, c’est qu’il est comme moi : il n’assume pas tellement d’être sur Tinder, n’est pas hyper sûr de lui et dit « juste vouloir se faire des amis ».
Du coup, on prend notre temps pour faire connaissance. Il est plutôt gentil, et comme il est également en Australie pour un working holidays depuis un peu plus longtemps que moi, il me parle beaucoup de ses expériences et de la vie à Sydney.
Après un laps de temps qui nous paraît raisonnable, on se rencontre une première fois pour un restaurant de son choix. Tout se passe plutôt bien, il est assez fidèle à ce qu’il était par écrit : gentil, simple et avenant. Je n’ai pas de coup de foudre mais pas de coup de massue non plus, il est plutôt cool. Et ça semble être pareil de son côté.
Au pire si la magie n’opère pas, ce n’est pas grave, j’aurai en effet trouvé un ami, et quand on vient d’arriver dans un nouveau pays, ça reste très précieux.
Mais ce n’est pas de ce rencard là dont je vais vous parler, car pour tout avouer il était relativement banal et tranquille, j’ai le souvenir d’un moment sympa avec rien de spécialement notable.
C’est après que ça devient n’importe quoi.
Donc pas de gros coup de cœur à la première rencontre, mais pas désagréable non plus. Nous continuons donc à discuter et à nous voir régulièrement autour d’un verre ou d’un repas de manière tout à fait platonique pendant quelques temps. Petit à petit nous devenons de plus en plus proches.
Jusqu’à ce qu’il m’invite finalement à un après-midi un peu plus romantique : balade au bord de la mer de plages en plages, de Bondi Beach à Coogee Beach. C’est une promenade dans la banlieue de Sydney, et si je ne l’ai encore jamais faite, on m’en a déjà parlé et je sais que le chemin est parfaitement aménagé pour les promeneurs.
Aussi, j’en profite pour sortir mes habits de lumières : petite robe et chaussures de ville mignonnes… pas spécialement tout terrain.
(Je vous vois commencer à sourire avec sadisme en imaginant la suite.)
Nous prenons le bus avec Alphonse, prenons un déjeuner et une bonne glace sur Bondi Beach avant de commencer notre petite balade.
En effet, tout est aménagé et le chemin est plutôt agréable :
Le temps est magnifique, le paysage superbe, on discute plutôt bien… Je sens même son intérêt pour moi grandir, ce qui me trouble un peu… Bref.
Sauf qu’au cours de la ballade, Alphonse remarque que les gens sont sortis du chemin aménagé pour aller crapahuter sur les rochers…
Ce qui lui donne évidemment l’idée de faire comme tout le monde.
Sauf que moi, non seulement je ne suis absolument pas chaussée pour, mais en plus j’ai un centre de gravité qui saisit la moindre occasion de me trahir depuis mon plus jeune âge et en qui je n’ai absolument pas confiance !
Non vraiment, c’est assez impressionnant comment j’ai la gamelle facile, alors je ne vois pas d’un très bon œil toute cette roche érodée.
Mais comme je sais qu’objectivement faire trempette dans l’eau c’est cool, que je n’ai pas envie d’être rabat-joie, et qu’à première vue, ce n’est quand même pas aussi tortueux que ça, je me prête volontiers au jeu.
Mais… Même avec toute la bonne volonté du monde, Pierre Richard reste Pierre Richard. Surtout qu’Alfonse est plus ambitieux que les autres promeneurs et décide de faire toute la côte sur les rochers, jusqu’à la prochaine plage… On quitte très vite le plat pour un bordel de roches sans nom. Il y a des trous gorgés d’eau de mer dans la roche où de la mousse traître et glissante s’est formée, et à force de dérapes incontrôlés, je comprends très vite que le sol ne sera pas mon allié dans cette aventure.
Je tremblote sur mes jambes, tenant fébrilement mon réflex en main, consciente que je suis en train de perdre terriblement en glamour et séduction à avancer laborieusement, faisant régulièrement des moulinets avec mes bras pour éviter de m’exploser sur les rochers.
Et alors qu’Alfonse gambade gaiement avec la légèreté et l’aisance d’un mouflon sur les falaises, moi je me sens comme un rhinocéros sur des skis.
A ce moment-là, mon niveau de confiance en moi est redescendu bien bas dans les tréfonds de la balourdise.
Mais Alfonse n’est pas un goujat.
Il voit bien que je suis en galère finie sur les échasses incertaines qui me servent de guiboles et c’est ainsi que, grand chevalier prêt à venir au secours de sa dulcinée incapable de mettre un pied devant l’autre… Il me tend la main.
Son regard est intensément plongé dans le mien, nos cœurs palpitent à l’unisson, chaque battement rythmé par le bruit des vagues, un rayon de soleil illumine son sourire doux…
J’observe l’expression de son visage qui m’invite à mettre ma main dans la sienne, pour sceller ce premier rapprochement physique entre nous…
C’est donc tout naturellement que… je panique ET LUI FOURRE MON SAC À MAIN DANS LA MAIN.
C’est un coup de théâtre ou je ne m’y connais pas.
Je n’ai aucune idée de ce qu’il m’a pris.
J’ai juste paniqué.
Vous avez déjà vu ce genre de films ou roman à l’eau de rose où l’héroïne a juste UN BOULEVARD devant elle pour pécho le mec, et qu’elle fait n’importe quoi par pure connerie ?
A chaque fois, on ricane grassement en disant « Mais n’importe quoi, personne réagirait de façon aussi débile dans la vie ! ».
Ben je vous jure que si. J’en veux pour preuve, l’héroine débile qui fait n’importe quoi, ce jour-là, c’était moi.
Je ne sais pas, en un quart de seconde tout a défilé dans ma tête : « Han, mais il m’invite à lui prendre la main, là non ? C’est une ouverture au rapprochement ? C’est un premier pas ? Ça veut dire qu’il est intéressé par moi ? … Ouais non, mais imagine que non… Imagine qu’il tend juste la main pour t’aider car tu es chargée avec ton sac, l’appareil photo et que tu es mal chaussée sur un chemin glissant… Si ça se trouve, il veut juste aider vite fait par bonté d’âme, et toi tu lui prends la main, et le mec est genre super gêné de se retrouver dans ce traquenard. GROS MALAISE. Non, je peux pas risquer ça. En fait, il veut juste m’aider car il voit que je galère de fou, ça veut pas dire qu’il veut qu’on se balade main dans la main… Non bah je vais lui tendre mon sac à main, c’est plus sûr. »
Voilà, ça s’est passé en un flash, mais c’est grosso merdo ce qui se passe dans la tête d’une meuf pas sûre d’elle et avec peu d’expérience dans ce genre de cas.
Alors qu’EVIDEMMENT c’était un premier pas pour se rapprocher et qu’EVIDEMMENT il s’est retrouvé comme un con, en brave chevalier soudain rétrogradé bagagiste avec mon vieux sac à main sur les bras à se coltiner au lieu de la douce balade main dans la main qu’il avait en tête.
En une seconde, en voyant l’effroi dans ses yeux, j’ai compris mon erreur.
M’aider à porter mes affaires, il s’en battait royalement les grelots.
Il m’avait vue en détresse et avait logiquement vu là une occasion en or de se rapprocher de moi.
Bien joué, l’artiste.
Mais digne, Alphonse accepte mon sac à main sans broncher, qu’il a porté fièrement en reprenant sa cavale maîtrisée sur les rochers tandis que je continuais à trembloter sur mes jambes mal assurées. (Et non, ce n’était même pas mieux sans les chaussures, être nulle est tout un art vous savez.)
Ceci dit, autant vous dire que son ego avait quand même pris cher avec ce vent magistral, et qu’un petit silence c’était installé entre nous.
Alphonse devait ruminer mon rejet, pendant que je me maudissais d’avoir le QI d’une huître en séduction.
Nous continuons toutefois – à mon plus grand désarroi – notre balade hors piste sur les rochers, et Alphonse bien plus à l’aise que moi et ne cherchant plus du tout à se rapprocher… marche d’un pas assuré devant moi, tandis que je peine à le suivre.
On arrive au bout, mais le passage se fait plus étroit, couvert de mousse glissante, et je continue de m’accrocher à la housse de mon réflex – que j’ai maintenant rangé – en espérant ressortir de cette balade indemne.
Sauf que… Encore une fois, le sort ne m’est pas favorable (rappelez-moi de ne jamais participer aux Hunger Games). Alors que je m’apprête à bientôt sortir des rochers pour reprendre le chemin normal… Une immense vague me prend en traître par derrière, et me propulse sur le rocher devant moi où je m’étale comme une crêpe.
Reconstitution de la scène :
Si près du but quand même, c’est moche.
Je vous rassure, entre la housse et sa coque tropicalisée, le réflex a survécu (sinon vous n’auriez pas ces photos…). Mais mon genou, lui, est mort dans la bataille.
Je dérape sur la mousse pour me relever, bois un peu la tasse, j’ai le genou en feu… Et quand je relève la tête, je vois le visage absolument dépité d’Alphonse.
Je me jure intérieurement que si cette fois il me tend la main, je m’y accrocherai comme une moule à son rocher. Mais vous vous doutez bien que cette fois il s’en garde bien.
Et comme je suis une chiffe molle, je n’ose évidemment pas le faire moi.
Il vient quand même voir si ça va, s’inquiète pour mon genou un peu amoché… Et me propose gentiment de retourner – ENFIN ! – sur le chemin aménagé, car il le comprend seulement maintenant, la Sonyan n’est pas tout terrain.
Je boîte, je suis fatiguée, je saigne, Alphonse s’en veut de m’avoir emmenée là… Alors au lieu de finir la balade jusqu’au bout, on se pose sur un banc pour admirer les surfers.
Enfoirés d’Apollons dotés d’un centre de gravité fiable.
Je m’en veux d’avoir tout gâché avec ma maladresse et mes réactions à côté de la plaque, que je suis un peu plus silencieuse qu’avant.
Alphonse, peut-être ruminant ce rencard raté, n’est pas plus bavard.
Nous rentrons finalement clopin-clopant au centre de Sydney, et je retourne chez moi reposer mon genou amoché, l’image de moi qui lui fourre mon sac à main sur les bras tournant en boucle dans ma tête.
Interlude : Le Christian Grey de Hong-Kong
Alors je ne classerais pas ce date dans le top 3 des flops car en vrai j’avais passé un bon moment, mais une de mes rencontres les plus cocasse a eu lieu à Melbourne, environ 4-5 mois après Alphonse.
J’avais matché avec un bel éphèbe, encore une fois en working holiday comme moi, tout droit venu de Hong-Kong.
Après quelques échanges, on se donne rendez-vous dans le centre de Melbourne, près de la rivière Yarra, pour nourrir les cygnes noirs et se promener dans le jardin botanique.
Le jeune homme me demande quels sont mes hobby… Je lui réponds simplement « lire, écrire, les voyages et les concerts »… Bref, rien de bien original, que de nombreuses personnes auraient pu répondre à ma place.
Et en toute logique, je lui retourne la question : « Et toi ? ».
Et là, monsieur me répond avec un naturel déconcertant « piloter mon avion ou mon bateau.».
Je me souvenais avoir vu une photo de profil où il était sur un yacht mais ne pas en avoir vraiment pris note : j’ai pris ça pour des photos de vacances.
Or le jeune homme, que nous renommeront Jean-Hyppolyte, m’avoue soudain qu’il est en fait le fils d’un grand homme d’affaires de Hong-Kong, qu’il en avait marre des pressions liées à son statut social et à la vie mondaine, et qu’il a réussi à négocier une année sabbatique en Australie avant de reprendre ses obligations et l’affaire familiale. Aussi, est-il là pour profiter de sa liberté et de rencontres « normales » avant de reprendre sa vie de grand héritier.
Un prince à New York version Australienne, quoi.
Pour prouver ses dires – même si je n’ai rien demandé – Jean-Hyppolite me montre des photos de sa vie et sa famille à Hong-Kong… Et en découvrant sa vie faites de déplacement en jet privé et de rolex, je me retrouve tout droit propulsée dans un drama.
Je me vois déjà, moi pauvre roturière, être prise en grippe par sa famille, survivre à maints obstacles car nos mondes sont trop différents, me faire kidnapper par le chef de l’entreprise adverse pour faire pression sur lui, subir un shitstorm médiatique où je me fais harceler par les paparazzi hongkongais… Pour finalement obtenir un happy end dans un aéroport –où le mec sera venu me retrouver en courant, crachant ses poumons au lieu de prendre les transports comme tout le monde – suivi d’un mariage digne de celui des Windsor avec sa famille qui aura finalement reconnu mes valeurs, malgré mes origines modestes et mes mauvaises manières.
Mon avenir est tout tracé, je le sens.
C’est donc ainsi qu’il m’invite généreusement à aller manger dans un fast-food chinois où il m’a payée des nouilles à 5 dollars dans le food court d’un centre commercial au milieu de lycéens.
Il n’arrêtait pas de s’émerveiller devant son bol de nouilles bon marché, fier d’être un rebelle envers sa famille et de s’encanailler avec une fille du peuple.
Régulièrement quand on se baladait dans la rue, il regardait les appartements hors de prix à vendre dans des tours flambantes du centre de Melbourne, appelant son père pour le rencarder sur les biens sympa où investir…
Au final, pour quelqu’un qui voulait s’intégrer aux « gens normaux » et oublier sa vie d’héritier l’espace d’un an, je réalise avec le recul qu’il remettait tout le temps sa richesse et son statut social différent sur le tapis alors que j’en avais un peu rien à secouer.
Bref, dans les films les nanas qui tombent sur un milliardaire finissent par vivre la vie de château… Moi j’ai eu des nouilles de fast-food dans un centre commercial pour divertir Sa Majesté.
J’imagine qu’on a les contes de fées qu’on mérite.
Top 2 : Alphonse contre-attaque
Un top trois de mes dates foirés, et on retrouve la même personne dans deux d’entre eux… Il faut se rendre à l’évidence : quand ça veut pas, ça veut pas…
Parce que malgré ce premier rendez-vous « romantique » raté, ça n’a pas sonné le glas de la fin des haricots entre Alphonse et moi. Le revoilà donc pour un second épisode.
Une fois rentrée et reposée, j’ai voulu recoller les pots cassés en l’invitant à passer la soirée en face de chez moi à Darling Harbour, un quartier portuaire de Sydney avec de nombreuses attractions, magasins… et des feux d’artifices tous les samedi soirs.
Quoi de plus romantique que des feux d’artifices ?
Alfonse accepte volontiers.
Motivée à nous redonner une chance, je propose même à Alphonse de passer me chercher à la maison avant.
En effet, c’est son anniversaire et je sais qu’il n’a aucun proche avec qui le fêter, alors j’ai préparé un petit gâteau maison pour lui.
En attendant qu’il arrive, je m’occupe des tâches ménagères, notamment ma lessive.
Il sonne au moment où je sors mes vêtements du sèche-linge, alors je m’empresse d’aller tout déposer sur mon lit dans ma chambre avant d’aller lui ouvrir.
Je lui offre son gâteau, avec bougies et un « Happy Birthday to you » mal chanté en bonne et due forme. Il est terriblement touché, et on déguste une petite part avec un verre avant de sortir profiter de Darling Harbour.
Il ne s’attendait vraiment pas à ce que j’ai préparé quelque chose pour lui et de mon côté je suis contente de lui faire plaisir.
Sans même chercher à séduire, je sais après bien des années d’expatriation, que la moindre attention peut faire mouche quand on se retrouve loin de ses proches pour son anniversaire, Noël ou autre événement à partager.
Après ce petit moment mignon qui rattrape un peu l’échec du précédent rencard, je pars rapidement prendre une veste parmi les vêtements propres que j’ai déposés sur mon lit, et on descend profiter du port.
On se promène le long de Darling Harbour éclairé de ses milles et un néons, entre prestations des artistes de rue, discussions et shopping.
On part déguster les meilleurs fudges de la ville après s’être enquillé un gâteau d’anniversaire maison, histoire d’être sûrs d’éviter la crise d’hypoglycémie.
On est jamais trop prudent.
Puis vient l’heure des feux d’artifice :
(Aperçu des feux d’artifices vus de ma chambre chaque samedi)
Encore une fois, le cadre est plutôt sympa.
Nous sommes assis parterre, côte à côte au bord de l’eau, mollet contre mollet, les yeux levés au ciel pour admirer l’explosion de couleurs au dessus de nos têtes.
Qu’est-ce qui pourrait bien foirer cette fois ? Aucun caillou glissant ou méchante vague à l’horizon !
Une fois les feux d’artifice terminés, on se relève et on s’apprête à repartir se promener quand une dame me tape sur l’épaule et me dit « Tenez, je crois que c’est à vous… »
Et là elle me tend du bout des doigts, un peu dégoutée… Une culotte.
Admettez que j’ai toujours le don de vous surprendre avec mes coups de théâtre complètement sortis de nulle part.
Moi-même j’en reste comme deux ronds de flan.
Car le fait est que… je la reconnais cette culotte, elle est bien à moi.
Une petite culotte nœuds rouges, un peu tâchée et un peu déchirée… Parce qu’elle fait partie de mon commando spécial indisposition féminine (traduction pour les nazes : je la garde pour les périodes de règles, parce que je m’en fous de l’abimer au reste).
Je me retrouve donc en pleine rue, face à mon rencard et une parfaite inconnue qui me tend du bout des doigts une des culottes LES PLUS FLINGUEES de mon placard.
Mais… POURQUOI ?
Pourquoi je me mets toujours dans des situations pareilles ? Comment c’est même possible d’ailleurs ?
Parce que… qu’est-ce qu’elle fout là, cette culotte ?! Comment est-elle arrivée dans les mains de cette dame ?!
Perdue, je tente un regard en coin à Alphonse qui reste interdit. Il observe d’un air suspicieux la culotte miteuse, puis se tourne pour scruter mon visage… et enfin ma jupe en fronçant les sourcils.
Ne me dites pas que… Il pense que j’ai enlevé ma culotte pendant les feux d’artifice ?!
Au mieux, il se demande juste si je mets réellement des sous-vêtements aussi misérables.
Je panique et fais donc ce que toute honnête femme ferait à ma place : JE MENS ÉHONTÉMENT.
« Ah non non, vous faîtes erreur, cette culotte n’est pas à moi… »
Mais malheureusement, la dame insiste : « Vous êtes sûre… ? »
Je fais mentalement mes adieux à cette brave culotte que je ne reverrai sûrement jamais après cela : « Oui, certaine. »
Mais notre commissaire des objets-trouvés est intraitable « Pourtant vous venez tout juste de la faire tomber. »
Ma dignité :
Toutefois, c’est à ce moment-là que je comprends.
Mes vêtements… Je les ai sortis en vrac du sèche-linge quand il est arrivé à la maison et je n’ai pas pris le temps de les ranger. Avant de partir j’ai pris une veste dans le tas pour ne pas avoir froid… Et la culotte devait être coincée dans la capuche ou que sais-je… Donc quand je me suis penchée pour me relever à la fin des feux d’artifice, elle est tombée de ma veste.
Un éclair de compréhension passe sur mon visage… et il ne passe pas inaperçu devant la dame qui ne me quitte pas des yeux.
Je mens, elle sait que je mens – de toute façon elle a vu cette culotte sortir de ma veste – et Alphonse… Bah Alphonse il a l’air un peu à perdu et il suit cet échange lunaire avec un froncement de sourcil perplexe.
Aujourd’hui je pense que j’en aurais rien à secouer et je prendrais la culotte en rigolant, mais à l’époque, je n’ai absolument pas assumé cette culotte du pauvre trouvée dans la rue.
Du coup, rouge de honte, je nie à nouveau.
Cette fois la femme n’insiste pas et part déposer du bout des doigts la culotte dans une poubelle – peut-être a-t-elle cru qu’on avait fait des folies dans une ruelle et que je n’avais pas remis mes sous-vêtements ensuite, mais je ne veux pas le savoir…
Quant à Alphonse, il semble dubitatif concernant la scène qui vient de se dérouler mais ne pose pas de question.
Je passerai le reste de la soirée à me demander pourquoi le sort s’acharne, ce qu’a pensé cette brave dame de moi, les doutes et les suppositions d’Alphonse sur cette culotte…
Au final – car je sais que vous êtes de gros curieux et que vous vous posez la question – il ne s’est jamais rien passé entre Alphonse et moi.
Au premier abord il était gentil et plutôt cool… Mais le fait est que je n’avais pas vraiment de coup de cœur, et qu’à long terme, certaines choses me déplaisaient profondément chez lui donc nous en sommes restés là…
Mais ces souvenirs de rencards maladroits dignes des comédies romantiques les moins inspirées me font toujours sourire des années après.
Interlude : le date le plus court de l’histoire
Je suis à Melbourne, quelques mois ont passé depuis Alphonse, et cette histoire se passe avant ma rencontre avec Jean-Hyppolite l’héritier rebelle des fast-food.
L’heureux élu de cette histoire s’avère être ma première rencontre sur Melbourne et portera le doux nom de Barnabé. On match, on discute un peu pendant quelques temps.
Finalement on propose de se voir, et on se donne rendez-vous en plein centre ville, devant la cathédrale Saint-Paul de Melbourne. On n’a pas prévu de sortie en particulier, mais il y a plein de cafés et restaurants dans le coin, je sais qu’on trouvera toujours un truc sympa à faire.
A l’heure dite, je vois arriver le jeune Barnabé et on se salue timidement.
Puis il enchaine directement en disant : « Allez viens, ma voiture est garée par là. »
Je me fige.
« Heu, comment ça, ta voiture ? Désolée on ne se connaît pas, je préfère éviter de monter directement en voiture avec toi.
-Mais… On va pas chez moi pour niquer ? »
Je réponds donc en toute candeur « Ben… non ? »
– Mais tu voulais faire quoi alors ?!
– Ben je sais pas… Je pensais manger un bout, boire un verre, discuter… faire connaissance, tout ça… ?
– Oh… Alors on s’est mal compris, moi je voulais juste niquer.
– Ah oui, en effet, on s’est mal compris.
– Wouah… Je suis désolé pour ça.
Et c’est ainsi que Barnabé s’est galamment excusé pour sa goujaterie, m’a souhaité une bonne soirée quand même, a tourné les talons et s’est barré sans demander son reste, sûrement déjà en quête d’une remplaçante suite à mon désistement impromptu.
Durée du rencard : trente secondes chrono.
Barnabé n’a pas le temps, il n’est pas là pour enfiler des perles. Ça valait bien le coup de se donner rendez-vous devant la Maison de Dieu, sombre pécheur.
Mais au moins, il n’a été ni insistant, ni impoli. Merci Barnabé, et bonne bourre continuation à toi.
Top 1 : Le Bel au bois dormant
Nous y voici, le top 1.
Clairement le rencard le plus surréaliste que j’ai jamais vécu. Et vous connaissez mon niveau.
En toute honnêteté, pour les top 3 et 2… C’est surtout le côté loufoque de mes maladresses qui me font rire après coup et qui font que j’ai retenu ces anecdotes plus que d’autres.
Bref, jusque là, c’était donc des petits fails rigolo, mais rien de si terrible finalement.
Que pour ce top 1, on part dans l’épique, le légendaire… le sonyesque.
Un an et demi se sont écoulés depuis Alphonse, Barnabé et Jean-Hyppolyte. Toujours aucune amourette à l’horizon.
J’ai délaissé les applications depuis déjà un bon moment, le temps de parcourir l’Australie (après Sydney et Melbourne, ça n’avait pas d’intérêt pour moi puisque j’étais toujours en mouvement), rentrer en France… puis revenir au Japon.
Mes premiers mois au Japon passent vite, entre ma réinstallation, les retrouvailles avec les amis, le travail, les projets… Les rencontres ne sont donc pas ma priorité dans un premier temps.
Mais le fait est que ça fait maintenant trois ans que je suis célibataire et que ça commence à me peser vraiment lourdement.
Alors je décide de retester Tinder au Japon (et ça vaut son pesant de cacahuète niveau profils).
Sauf que… j’ai changé.
Je vous disais dans le chapitre 2 du Manuel du petit ami Japonais que j’abandonnais et que je laissais ma place aux autres. Des années plus tôt, je m’étais déjà lassée des rencontres codifiées à la japonaise, des premières semaines (MOIS ?) de conversations qui sont toujours les mêmes, des sempiternels « Quel est ton plat japonais préféré ? », « Est-ce que tu manges du Natto ? », « Tu préfères le Japon ou la France ? »…
Et voilà qu’entre temps, j’avais vécu et fait des rencontres en Australie… Et ok, je n’avais peut-être pas trouvé l’homme de ma vie, mais j’avais retrouvé quelque chose qui m’avait énormément manqué : la spontanéité des échanges.
Bien sûr, même en Occident les premières conversations sont toujours un peu redondantes (« Salut, ça va ? Quoi de neuf ? »… Qu’est-ce qu’on répond de neuf à quelqu’un qui ne sait rien de vous ?!), mais il y a toujours une poignée d’originaux et quand le feeling est là, ça se décante assez vite.
Au Japon… C’est un peu moins fluide selon mon humble ressenti.
Aussi, je me rends compte que je refuse quasiment tous les profils Japonais d’office, sans même leur laisser une chance, car j’ai une flemme intersidérale de repasser par tout ce pataquès et que je suis devenue une expat blasée.
Mais au bout d’un moment, ma conscience bien-pensante ne peut s’empêcher de se remettre en question : « Oui, mais tous les dégager d’office, est-ce que c’est du racisme ? N’est-ce pas de la discrimination que de refuser chaque Japonais sans même essayer… ? T’es revenue vivre au Japon ma cocotte, va bien falloir cohabiter. ».
Repentie, je décide donc de faire table rase sur mes mauvaises expériences passées et de redonner sa chance à l’autochtone.
Et je commence donc à relâcher quelques « like » à des profils un peu moins soporifiques que d’autres, histoire de ne pas passer à côté de l’homme de ma vie juste pour m’éviter les 「日本語上手ですね!」( « Que tu parles bien Japonais ! », qu’on se bouffe à toutes les sauces et qui nous agace tous au bout de quelques années).
Et c’est ainsi que, pleine de bonne volonté, je finis par matcher avec Leopold (oui, un prénom typiquement japonais…).
On entame une discussion et bon… Il n’est pas vraiment passionnant, mais il a un petit chien en photo de profil et mon propre chien me manque. Du coup, on parle passion canine, et – peut-être plus séduite par la boule de poils que par son maître – je finis par sympathiser.
Clairement, Léopold n’a pas le monopole de l’originalité et je me bouffe TOUTES les phrases et questions surfaites que je redoutais.
Mais je prends sur moi, et essaie de retrouver l’enthousiasme et l’innocence de mes premières années au pays du soleil levant.
Léopold habite à bout de brousse, et en bon Japonais, il est très occupé – le syndrôme isogashit qui sévit sur le pays depuis des décennies – donc difficile de trouver un créneau pour se voir, mais on finit par se caler un samedi après-midi.
Il me propose de se voir dès 14h à Roppongi.
Ok, pourquoi pas.
On se retrouve évidemment à l’endroit que je déteste le plus dans cette ville : sous la « Maman », l’araignée géante de Roppongi Hills.
Non vraiment, en tant qu’arachnophobe, cette sculpture est éprouvante et l’attendre là-dessous me met en sueur. Rien qu’uploader cette photo me fout des frissons.
Certains me diront que je ne suis pas très chauvine, puisque c’est l’œuvre d’une artiste française, Louise Bourgeois mais… Sérieux, elle pouvait pas faire des chatons à la place ?
Je retrouve assez rapidement le jeune homme, tout intimidé de vivre son premier date avec une étrangère, et sous un soleil de plombs, on arpente les petites rues de Roppongi pour aller se manger de bons cinnamon rolls au CINNABON.
C’est donc le moment où on essaie de manger dignement sa pâtisserie sans se mettre du glaçage partout, tout en continuant d’échanger des banalités.
Respectant toujours le code des conversations balisées, Leopold me demande ce que j’aime faire quand je sors avec mes amis. Moi-même, je ne suis pas très originale dans mes réponses : izakaya, karaoke, cinéma…
Il bloque sur le karaoke « Oh ! Mais du coup, tu chantes des chansons en Japonais ? Oui ?! Oh, j’aimerais trop entendre une étrangère chanter en Japonais…! Tu veux bien aller au karaoke que je vois ça ?! ».
Arf.
L’expat blasée sur mon épaule gauche s’insurge : « Encore un qui veut que tu fasses le petit singe savant pour le divertir ! », tandis que la candide bien-pensante sur mon épaule droite tempère : « Il ne pense pas à mal ! Et de toute façon, vous aviez rien de prévu de spécial, alors pourquoi pas un karaoké ? C’est toujours sympa.».
Alors soit, vendu pour le karaoke.
Donc très vite, on se retrouve dans notre petit box à deux, télécommande en mains devant le catalogue infini de chansons.
Il se dit timide et refuse de chanter « Non non, toi en premier ! Moi je chanterai après ! ».
Ah ben nous voilà beau. Je suis vraiment là pour faire le spectacle, apparemment.
Docile, je choisis donc une chanson japonaise relativement connue, et commence à chanter.
Il est tout excité et lâche des すごい!(Incroyable !) à tout va, à deux doigts de me filmer pour monter aux copains sa trouvaille : une Française qui chante en nipponois. Wouaouh.
Pendant que je chante, le serveur vient dans notre box pour nous apporter nos boissons, un cocktail fruité pour moi et une bière pour lui, dont il apprécie la fraîcheur tout en m’écoutant avec des étoiles dans les yeux.
Je finis ma première chanson sous son admiration un chouya exagérée, et comme il n’a pas choisi encore sa chanson, il me propose d’en remettre une pendant qu’il cherche ce qu’il veut chanter.
J’espère qu’il ne va pas me faire le coup de ne chanter qu’une fois sur cinq, mais soit. Je remets donc une chanson.
Cependant, l’euphorie de la découverte est passée. C’est bon il sait à quoi ressemble une Française qui chante en Japonais. Ainsi Leopold se désintéresse de mes prouesses de chanteuse venue d’ailleurs pour plonger son nez sur l’écran tactile de la télécommande et se chercher une chanson, toujours en dégustant sa bière.
Moi je termine ma chanson tranquillement, puis repose le micro… et rien ne se passe.
Leopold ne dit rien, la chanson suivante ne se met pas en route… Le néant.
Alors je me tourne vers lui, et ce que je vois ressemble plus ou moins à ça…
LE PELO S’EST ENDORMI !!!!!!
Non mais vous y croyez ? Sérieux, abandonné cinq minutes à son triste sort, le mec dort déjà du sommeil du juste affalé sur sa banquette la bave à la bouche !
Putain, j’ai déjà vécu pas mal de trucs tordus, mais celle-là on me l’avait jamais faite !
Décontenancée, je tente quand même un réveil : « Léopold ? Léopold… ! C’est à toi de chanter… ! ».
Mais le mec est rouge vif, il ouvre vaguement un œil, marmonne je ne sais quoi… Et se rendort.
Eh merde… Il est cuit.
Je suis tombée sur un de ces Japonais qui ne tient absolument pas l’alcool. Le gars a même pas bu la moitié de sa bière, et il est déjà complètement dans le cirage !
Le voilà donc en mode déchet sur sa banquette…. Pendant que je me retrouve seule avec mon micro. Ça fait même pas une heure qu’on se connaît, ça commence bien.
Qu’est-ce que je fais ?
J’ai essayé de le réveiller mais ça n’a pas été probant. Je pourrais m’en aller mais… Une part de moi culpabilise de laisser ce pauvre bougre complètement bourré avec ses trois vieilles gorgées de bière cuver seul dans un karaoke.
Au final, je décide d’être pragmatique : nos 2-3 heures de karaoke sont commandées, notre formule de boissons à volonté aussi, et ça fait longtemps que je n’ai pas chanté.
Je décide donc d’ignorer la viande saoule endormie à côté de moi et de vivre ma meilleure vie : je chante à tue-tête et commande mes consommations sans compter.
Autant vous dire que Leopold a manqué un spectacle d’anthologie. Lui qui était curieux de voir une étrangère chanter, au fur et à mesure que le temps passait, et que je voyais que son sommeil était imperturbable, je me suis lâchée et j’ai fait un show digne de Beyoncé.
Et vas-y que je tente les chansons aux aigus casse-gueule (Chandelier de Sia pour n’en citer qu’une), les gros sons de metalleux avec une death voice magistralement ratée, les Disney niais avec un « Let it go » que plus personne ne peut pifrer…
Je m’en donne à cœur joie. Je fais les chorée, je monte sur les sièges – true story- et j’occupe au mieux ces heures laissée seule à l’abandon… Heureusement que j’aime chanter.
Pendant tout ce temps, Leopold est au max…
Se passe ainsi plusieurs heures, jusqu’à ce qu’on reçoive le coup de téléphone de la réception à 10 minutes de la fin du temps imparti, pour nous prévenir que notre session est bientôt terminée.
Le téléphone réveille notre jeune dormeur, qui sort lentement de sa léthargie… et n’assume pas du tout :
« Oh pardon, c’était si beau que j’ai fermé les yeux et je me suis assoupi quelques minutes quand tu chantais. »
Non mais gros, tu t’es pas ASSOUPI ??! T’as juste tapé ta meilleure sieste en plein rencard pendant que je me retrouvais à flirter avec le micro faute de mieux !
J’ai eu le temps de préparer ma participation à The Voice et Incroyable talent pépouze pendant que tu piquais ton roupillon !
Quelques minutes qu’il me dit en plus, quelle audace !
Le mec a bien de la chance que j’aime pousser la chansonnette et que j’avais envie de rentabiliser mon déplacement, sinon il se serait juste réveillé tout seul.
Sans pitié, je lui précise que toute la séance est terminée et que j’ai passé des heures à chanter seule. Donc non, il n’a pas juste « fermé les yeux quelques minutes », il a fait un coma au nez d’une meuf qu’il connaît à peine.
Leopold s’excuse platement, il est confus. Il ne pensait pas que sa bière (même pas terminée…) lui monterait tant à la tête… Il est fatigué en ce moment, il fait chaud, tout ça.
On passe à la caisse dans un silence pesant, et il insiste pour payer le karaoke alors qu’il n’en a même pas profité cinq minutes.
Je m’apprête à rentrer chez moi, quand Léopold tente de faire amende honorable : « Je suis vraiment désolé… Je t’ai laissée passer l’après-midi toute seule, ça ne se fait pas. J’étais fatigué, je n’ai pas tenu ma bière… J’aimerais vraiment me rattraper. En plus j’appréciais ta compagnie alors… Est-ce que tu accepterais d’aller dîner avec moi ? »
Heu… En toute honnêteté, mon intérêt pour Léopold déjà relativement ténu de base s’est envolé en fumée à la seconde où je l’ai vu ronfler la bouche ouverte. Mais une part de moi a pitié de lui.
C’est pas nouveau que certains Japonais ne tiennent absolument pas l’alcool, et j’imagine qu’il s’en veut de s’être endormi comme ça.
Surtout qu’au final, on a pas tellement échangé durant toute cette journée, à part le bref moment où on a mangé nos roulés à la cannelle.
Léopold me propose de se rattraper et de m’inviter à manger tout ce qui me ferait plaisir.
L’expat blasée veut juste rentrer chez elle buller devant une série, mais la bien-pensante pense qu’il a quand même mérité une seconde chance. En plus, il y met quand même du sien, il a l’air de bonne volonté.
Aussi, bien que peu motivée, j’accepte de poursuivre la journée et d’aller dîner avec lui.
Il me demande ce que j’ai envie de manger, il se trouve que j’ai une terrible envie d’huîtres et de poisson cru, et qu’il connaît l’adresse parfaite pour ça.
On prend donc les transports pour se déplacer jusqu’au quartier de Iidabashi, où il m’emmène dans un restaurant perdu dans les sous-sols d’une petite rue. Clairement un endroit que je n’aurais jamais trouvée seule.
Et j’avoue que le carte est très alléchante. Je retrouve ma joie de vivre et me dis que j’ai bien fait de lui donner sa chance, finalement. (L’estomac est facilement corruptible.)
Il commande plusieurs plats, à base d’huîtres, de carpaccio de thon rouge ou autre… puis parcours le menu des alcools…
Guilleret, Leopold me dit innocemment « Je vais prendre une bière, et toi ? ».
Sceptique après cette expérience saugrenue au karaoke, je tempère : « Mm, tu es sûr ? La bière ne t’a pas trop réussi tout à l’heure, donc c’est peut-être plus raisonnable de prendre sans alcool, non ? ».
Mais Leopold s’offusque. Il me soutient que tout à l’heure, c’était la chaleur et la fatigue, à cause de son travail très prenant. Là, il s’est bien reposé – tu m’étonnes ! -, il fait moins chaud, on va manger… Aucun risque que la mésaventure du karaoke ne se reproduise !
Bon.
Léopold est un grand homme trentenaire, il sait se gérer après tout. Et franchement, j’ai pas la foi de materner un gusse que je connais depuis moins de 24 heures.
Je le laisse donc commander sa bière.
Très vite, on nous sert donc notre première séries de plats, ainsi que nos boissons.
Je dois avouer que, si je ne le trouve toujours pas vraiment passionnant, Leopold a trouvé une pépite. Tout est succulent dans ce restau, et je me régale.
Lui aussi, mange et boit de bon cœur.
Je retrouve un minimum de motivation à poursuivre ce rencard foireux. Il me pose des questions sur ma vie en France et comment je suis arrivée au Japon, et je commence à lui raconter quand…
Je vois que mon interlocuteur est encore une fois bien rougi par ses deux gorgées de bières et que…. IL LUTTE !
Il lutte pour maintenir ses paupières ouvertes pendant que je lui parle !
C’est lui qui dort, mais c’est moi qui fatigue en vérité.
Je tente quand même de le garder avec nous.
« Léopold ? Léopold, ça va ? Tu t’endors… ? »
Réponse décomplexée de Léopold :
Le mec s’est… à nouveau rendormi. Y’a du chlorophorme dans ses bières ou quoi…?! Il est narcoleptique ?
Et encore une fois, j’ai beau essayer de le réveiller… Rien à faire.
Pire, cette fois on n’est pas dans un box isolée, mais au milieu d’un restaurant, à la vue de tous les clients et serveurs.
Serveurs qui, continuent de débarquer pour nous servir petit à petit tous les plats que nous avons commandés pour deux.
Ils couvrent donc la table de mets divers… Devant un mec ronflant aux corneilles à table et une étrangère pathétique aux abois.
Malaise TV, le retour.
Je me retrouve seule à table devant une multitude de plats à honorer seule, face à la belle aux bois dormant des bas fonds.
J’ai envie de me casser et de le laisser se réveiller seul comme un con dans son restaurant de merde… Mais mon côté pigeon victime ne peut se résoudre à le laisser comme ça.
Et une part de moi me dit que je l’ai bien cherché. Ce trou de balle m’a déjà dormi au pif tout l’après-midi, et malgré tout, je l’ai laissé m’emmener au restaurant et se recommander une bière… C’est chercher la merde ou je ne m’y connais pas.
Aussi, je reste aussi pragmatique qu’au karaoke, et profite de mon repas – excellent – tout en discutant avec des copines sur messagerie, pour leur raconter ce nouveau misérable échec. J’en profite pour tailler un costard au bougre, rhabillé pour les dix hivers suivants.
Même les serveurs sont gênés de venir à ma table me demander si je souhaite autre chose, c’est dire…
A la fin du repas, je réveille Leopold… qui paraît stupéfié. Même lui semble refuser croire qu’il a réussi à faire le même coup DEUX FOIS dans la même journée.
Il faut dire que c’est une performance tout à fait remarquable.
Toutefois, notre jeune homme ne se laisse pas démonter.
Il agit comme si de rien n’était, me demande si j’ai apprécié le restaurant avec un culot monstre, et vante même la carte qu’il n’a même pas goûté puisque je me suis quasiment tout tapé toute seule.
Je suis fatiguée et le laisse déblatérer dans son coin, jusqu’à ce qu’il prononce les mots improbables : « C’était vraiment sympa aujourd’hui, j’aimerais beaucoup te revoir. »
Non mais mec, comment tu peux me dire un truc pareil ?!
Après 7h de rencard passées ensemble, t’as dû passer max 2h éveillé ! J’ai passé la journée à chanter, bouffer et picoler toute seule ! Autant sortir solo à ce stade.
Mon agacement l’emporte, je lui réponds donc sans filtre que je n’ai vraiment aucune envie de le revoir après tout ça.
Léopold « Mais pourtant… Moi j’ai passé un bon moment… ! »
– Comment tu peux dire ça, tu as dormi tout le long !
– Pardon… J’ai du mal à tenir l’alcool…
Donc je lui précise que si justement il a du mal à tenir l’alcool, absolument rien ne l’obligeait à en consommer.
Et que OK, au karaoke, la chaleur, la fatigue, il a pu se faire avoir par surprise mais… Pas deux fois dans la même journée, quand même ! Le mec est adulte, il doit savoir se gérer un minimum.
Et là, il me sort le pire plaidoyer du monde : « Mais j’ai fait ça pour t’impressionner !! »
Ah bah c’est réussi !
« Je ne voulais pas que tu me prennes pour un gamin si je ne buvais que du jus de fruit, alors j’ai voulu boire de l’alcool pour te montrer que je suis un homme ! »
Heu…
Ecoute Léopold, je ne dirais pas que c’est un échec, je dirais juste que ça n’a pas marché.
Je réponds en toute franchise à Léopold que je l’aurais trouvé moins immature en commandant un lait chaud sucré au miel mais qu’il soit capable d’assurer une conversation, plutôt que s’entêter à commander des boissons qu’il ne tient pas pour me ronfler au pif.
J’ai donc catégoriquement refusé de le revoir car j’avais déjà assez donné de mon temps, et je l’ai laissé prendre le train pour son bout du monde, pendant que je prenais celui dans le sens opposé pour rentrer dans mon home sweet home.
Je n’ai évidemment jamais tenté de le revoir malgré quelques tentatives qu’il a faites par message par la suite, et sauf erreur de ma part, je crois bien que c’est mon dernier rencard avec un Japonais tout court.
Après j’ai juste assumé le fait que j’étais blasée et que je n’avais même plus envie d’essayer… Oups.
Voilà, j’espère que ces petits déboires amoureux vous auront fait rire en cette symbolique date de la Saint Valentin. (J’en profite pour souhaiter un joyeux anniversaire à un de mes humains préférés : Mila❤︎.)
N’hésitez pas à nous faire rire à votre tour en commentaires si vous avez des histoires de dates ratés qui valent le coup, pas de raison qu’on se moque toujours des mêmes, hein !
Je tenais également à vous remercier au passage d’être toujours au rendez-vous. Ces deux dernières années je n’ai quasiment donné aucun signe de vie, même sur les réseaux où je peux parfois m’abstenir de poster pendant des semaines… Et pourtant, vous êtes toujours là.
J’écris un article, et j’ai plein de retours adorables… Ça n’a vraiment aucun prix.
J’essaierai d’être à la hauteur de cette fidélité.
Sur ce, je vous dis à très bientôt pour de nouvelles aventures !